Entreprise individuelle ou société, Comment faire le choix ?


Quelle que soit l’importance et la nature  de l’activité envisagée, l’entrepreneur  doit tout  d’abord  déterminer  le cadre  légal autrement dit la structure  juridique la plus appropriée  dans laquelle il va exercer son  activité : s’établir en  tant  qu’entreprise  individuelle ou créer une société ?

Choisir son statut  juridique c’est décider du régime fiscal et social, du mode  de fonctionnement et  de gestion,  du degré  d’engagement du créateur,  des  potentialités   de  développement et  des  possibilités de transmission de l’entreprise.

Ce choix doit être étudié minutieusement, avec l’aide d’un professionnel, car il entraîne  un certain nombre  d’effets sur le statut  tant  au niveau patrimonial que social et fiscal. Il peut  également  engager  l’avenir de l’entreprise.

1 - L’entreprise individuelle

L’entreprise est dite individuelle, lorsqu’elle est exploitée par une seule personne physique ayant la qualité de commerçant. Dans une entreprise individuelle, l’entrepreneur  appelé  communément «entrepreneur individuel» exerce  son  activité  professionnelle  en  son  nom  propre. L’entreprise  individuelle est  une  entreprise   dont   la  création   et  la direction résultent de la volonté de l’entrepreneur  qui décide d’affecter une partie de ses biens personnels à son activité.

Cette option présente l’avantage d’être souple, peu coûteuse et extrêmement simple en  termes  de  gestion  et  de  fonctionnement. Il est en effet plus simple de créer et de gérer une entreprise individuelle qu’une société. En outre,  aucun capital minimum n’est requis puisque les créanciers commerciaux ont pour garantie  le patrimoine  personnel de l’entrepreneur  individuel.

Sur le plan  juridique, l’entreprise  individuelle n’a pas  la personnalité morale, c’est-à-dire qu’il y a une coïncidence parfaite entre l’entreprise individuelle et l’entrepreneur.  Elle n’a donc pas de patrimoine  distinct de celui de l’entrepreneur  et on parle de «confusion des patrimoines».

Cette confusion des patrimoines  peut avoir des implications graves en cas de redressement ou de liquidation judiciaire. En effet, l’entrepreneur individuel est  responsable  indéfiniment  des  dettes,   contractées lors de son activité professionnelle, sur la totalité de son patrimoine professionnel  et  personnel.  Si l’entreprise  génère  des  pertes  et  que les actifs  réalisables  de  l’entreprise  ne  suffisent  pas  à  désintéresser les créanciers, ces derniers peuvent  faire saisir les biens personnels  de l’entrepreneur  pour se faire rembourser.

Les bénéfices  de  l’entreprise  doivent  être  portés  dans la déclaration personnelle  de revenus de l’entrepreneur.  Ils seront,  par conséquence, soumis à l’impôt sur le revenu.

L’entreprise portera officiellement le nom patronyme de l’entrepreneur. Mais il peut naturellement adjoindre un nom commercial (enseigne).

A- Les avantages de l’entreprise individuelle

L’entrepreneur  individuel réunit en sa personne  l’apport des capitaux et la totale  direction de l’entreprise. Il  a une grande liberté  d’action puisqu’il est  le seul maître  à  bord  et  n’a de  «comptes  à  rendre»  à personne.  En effet, la notion d’abus de biens sociaux n’existe pas dans l’entreprise individuelle.

L’entreprise individuelle est  créée  sans  aucune  condition  de  capital minimal. Son coût  de  création  est  faible et  l’entrepreneur  n’a pas  à répondre  aux contraintes  liées à la constitution  et au fonctionnement d’une société

B- Les incidences  de l’entreprise individuelle
•   La responsabilité pécuniaire de l’entrepreneur  est illimitée puisqu’il est responsable sur l’ensemble des dettes  contractées à l’occasion de l’exploitation de l’entreprise.
•   Présentant  des garanties financières limitées, l’entrepreneur individuel a des possibilités d’emprunt également  limitées.
•   Dans le cas d’une succession, les longueurs et les difficultés de liquidation et de partage  du patrimoine successoral font que l’entreprise risque de ne pas survivre à l’entrepreneur.
•   Sur le plan fiscal, l’entrepreneur  individuel ne peut pas prélever une rémunération  et la comptabiliser comme une charge. De même, la rémunération  de l’entrepreneur  individuel ne peut pas être assimilée à un salaire soumis aux cotisations sociales.


2 - L’entreprise sociétaire ou société

Créer à plusieurs personnes  est généralement motivée par l’association des moyens et des compétences afin d’augmenter les chances de réussite de l’entreprise. En créant une société, les associés donnent  naissance à une nouvelle personne juridiquement distincte des fondateurs. On parle alors d’une personne  morale.

S’agissant d’une «nouvelle personne»,  la société aura un nom (dénomination sociale), un domicile (siège social) et devra disposer d’un minimum d’apports  (capital social) constituant son  patrimoine  initial pour faire face à ses premiers investissements et premières dépenses.

La création   d’une  société  peut   être  un  moyen  de  protection   du patrimoine de l’entrepreneur dans la mesure où la société dispose de la personnalité  juridique c’est à dire elle dispose d’un patrimoine, et peut agir en son propre nom, sous les traits du dirigeant de la société. Elle peut conclure des contrats, mener une action en justice, etc. Dès lors, en cas de dette,  les créanciers peuvent  recourir au paiement  uniquement contre la société.

En principe, la responsabilité  des associés est  limitée aux apports,  le risque auquel ils s’exposent est le non remboursement de leur apport.

Cependant  ce principe subit certaines exceptions :

Il existe trois sociétés à risque illimité : la société en nom collectif (SNC), la société en commandite  simple (seul le commandité  est responsable de  façon  illimité), et  la société  civile (qu’elle soit professionnelle,  ou immobilière).

2. La faute de gestion du dirigeant ayant entraîné le dépôt de bilan : Les biens personnels des associés seront  à l’abri de l’action des créanciers de l’entreprise seulement  si de fautes  de gestions  graves ne sont pas commises par le ou les dirigeants de droit ou de fait.

Le dirigeant peut être condamné  à payer tout ou partie du passif de la société dans le cadre d’une procédure  collective. On parle dans ce cas de responsabilité pour insuffisance d’actif.

Aussi, le dirigeant désigné pour représenter  la société vis à vis des tiers, n’a pas à agir «pour son compte»,  mais «au nom et pour le compte» de  la personne  morale  (la société). Il  doit  donc  respecter  un  certain formalisme  lorsqu’il  devra  prendre   des  décisions  importantes.   De même, il  devra périodiquement rendre  des  comptes  aux associés  ou actionnaires sur sa gestion de l’entreprise. Si le dirigeant utilise les biens de la société à des fins personnelles, il peut être poursuivi pour abus de biens sociaux.

A - Avantages de la constitution en société

- Personne morale  distincte
La constitution  et l’immatriculation d’une société  lui consacre  la personnalité  morale  qui lui confère  les mêmes  droits  et  obligations que la personne  physique. Elle peut acquérir des biens, contracter  des dettes,  conclure des contrats,  ester en justice.
Le  patrimoine   de   la  société,   constitué   de   ses   actifs   (mobiliers, immobiliers, trésorerie,  …) et ses passifs (dettes,..) est distinct de celui de ses associés, actionnaires et dirigeants.

De même,  son  patrimoine  continue  d’exister jusqu’à  sa  dissolution, même  si un  ou  plusieurs associés,  actionnaires  ou  dirigeants  cèdent leurs parts ou actions, quittent  la société ou décèdent.

- Responsabilité limitée
En principe la responsabilité des associés ou actionnaires est limité aux apports  de ces derniers dans les sociétés dites de capitaux à l’inverse des sociétés de personnes pour lesquelles les associés sont indéfiniment et solidairement responsables  des dettes  sociales.

Ainsi, si  la  société  déclare  faillite, la  perte   de  chaque   associé  ou actionnaire se limite à son investissement initial à moins qu’il ait donné des garanties  personnelles  pour les dettes  de la société.  Bien que les associés ou actionnaires  en soient propriétaires,  un créancier ne peut pas les poursuivre pour les dettes  contractées par la société.

- Avantages fiscaux
La société est imposée séparément de ses associés ou actionnaires  et dans certains cas, la constitution en société peut conférer des avantages fiscaux.

- Meilleur accès aux capitaux
Il  est  habituellement   plus  facile pour  les entreprises  constituées  en société  de trouver des capitaux par voie notamment d’augmentation du capital, d’émission d’emprunt  obligataire,… Ce qui n’est pas le cas de l’entreprise individuelle.

- Existence perpétuelle
Contrairement  à l’entreprise individuelle ou à la société de personnes, la société de capitaux ne cesse pas d’exister au décès de son ou de ses propriétaires. Même si tous les associés, actionnaires et administrateurs décédaient, la société de capitaux continuerait  d’exister, et la propriété en  serait  transférée  aux héritiers des  associés  ou  actionnaires.  Cette garantie  d’existence perpétuelle  donne  à l’entreprise plus de stabilité, ce qui permet une planification à long terme et l’obtention de modalités de financement  plus favorables.

B - Incidences de la constitution en société

- Coûts de démarrage plus élevés
Les coûts de démarrage  sont plus élevés dans la constitution en société par rapport  à l’exercice de ses activités dans le cadre d’une entreprise individuelle. Ces coûts sont directement  liés à la constitution  en société ainsi qu’aux honoraires occasionnés par le recours à des services juridiques et comptables.

- Formalités  administratives plus importantes
La constitution  en  société,  nécessite  l’accomplissement  d’un  certain nombre  de formalités supplémentaires  et la présentation de plusieurs documents  notamment:

•  La rédaction et enregistrement des statuts  constitutifs;
•  La publication d’une annonce  dans un journal d’annonces légales et dans le bulletin officiel
•  La rédaction des rapports de gestion
•  Les PV des assemblées générales ;
•  Les avis informant de tous les changements concernant la composition du conseil d’administration ou de l’adresse du siège social.

- Structure plus complexe
Une société  est une personne  morale qui doit agir par l’intermédiaire d’un représentant personne  physique.

La société  commerciale a besoin d’organes  pour assurer son fonctionnement. Il  repose  sur  la présence  de  trois  types  d’organes appelés organes sociaux :

Les organes de direction (gestion), chargés du pilotage de la société, ils représentent la société et ont le pouvoir légal de l’engager vis-à-vis des tiers. Ils diffèrent selon les sociétés.

•  Les organes de délibération : ce sont les assemblées générales d’associés. Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives.
•  Les organes de contrôle : Les commissaires aux comptes.


3 - Entreprise individuelle  ou société, Comment faire le choix ?

Généralement  le choix d’une structure juridique dépend  à la fois d’obligations  et  d’options  personnelles  : Le type d’activité exercé,  la volonté ou non d’association, le niveau de responsabilité à assumer, le degré de contrôle à exercer, la capacité financière et le statut  fiscal et social du chef d’entreprise,

Pour l’identification de  la structure  la plus appropriée  à sa situation, le choix du créateur  d’entreprises doit se faire sur la base de plusieurs critères sans que ce choix ne soit fondé sur un seul d’entre eux: le critère économique  et financier, le critère juridique et patrimonial et le critère fiscal et social.

3.1  Le critère économique et financier

Cet aspect  conduit  le créateur  à s’interroger  sur l’importance de son projet, si l’entrepreneur  anticipe une activité très réduite,  les coûts de création  et  de  fonctionnement d’une  société  ne  sont  peut  être  pas justifiés et  la simplicité de  l’entreprise  individuelle peut  dans  ce  cas constituer un choix approprié.

Aussi, si l’entrepreneur  souhaite,  immédiatement ou  dans  un  avenir proche,   s’associer  avec  d’autres   personnes   pour   développer   son activité, il doit opter pour la création d’une société. Ainsi, l’entrepreneur peut  facilement,  s’il le désire,  partager   une  partie  du  capital  de  la société  avec d’autres  personnes,  qu’il s’agisse d’ailleurs de personnes

physiques  ou  d’autres  sociétés.  Les nouveaux  associés  participeront alors financièrement  aux résultats de l’entreprise en recevant une part des dividendes qui est généralement proportionnelle  à leur part dans le capital.

3.2  Le critère juridique et patrimonial

Dans  une  entreprise   individuelle, le  patrimoine   de  l’entreprise  est confondu   avec  celui  de  l’entrepreneur.   Le décès  de  l’entrepreneur individuel emporte  la cessation  d’activité. Cette dernière  a des conséquences négatives  sur  l’entreprise:  les  comptes  sont  bloqués, les  bénéfices  sont  immédiatement imposés,  une  taxation  des  plus- values latentes peut avoir lieu ce qui entraîne une période d’incertitude pour  la  gestion  du  fonds  de  commerce.  Pendant  la  liquidation  de la  succession  par  le  notaire,  l’entreprise  est  gérée  selon  les  règles de  l’indivision qui  peuvent   conduire  à  des  situations   de  blocage. En revanche,  dans  une  société,  le décès  du dirigeant  n’emporte  pas cessation  d’activité,  les  statuts   peuvent  organiser  cette  période,  ils peuvent  nommer  le futur  dirigeant.  De plus, les parts  ou les actions sont plus facilement transmissibles et peuvent  aisément  être réparties entre les différents héritiers.

3.3  Le critère fiscal et social

Il est difficile d’évaluer précisément  le chiffre d’affaires prévisionnel de la future entreprise et d’effectuer ainsi une optimisation fiscale réaliste. Les bénéfices de l’entreprise seront assujettis à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés selon la structure juridique choisie.

Toutefois, si l’entreprise  peut  bénéficier d’une  mesure  d’exonération d’impôts sur les bénéfices, il peut être avantageux de choisir une structure qui permettra  à l’entrepreneur de se placer sous le régime de l’impôt sur le revenu. L’exonération portera  alors sur l’intégralité des bénéfices,  y compris sur la part correspondant à la rémunération du ou des dirigeants. Aussi, Le régime  social du  dirigeant  d’une  entreprise  dépend  de  la structure juridique retenue  et de sa participation au sein de celle-ci.

Le critère social a longtemps été déterminant dans le choix de la structure juridique. En effet, certains créateurs constituent  des sociétés pour être rattachés,  en tant que dirigeant, au régime général des salariés.

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